Grien, Grün, Vert
Le terme grien, surnom de Baldung, est l’équivalent en vieil allemand de l’adjectif moderne grün signifiant « vert ». Divers documents d’époque, notamment un journal tenu par Albrecht Dürer, parlent ainsi de « Grünhans » et d’un certain « Hans Grun ».
Le surnom « grien » pourrait avoir été attribué à Hans Baldung durant sa séjour dans l’atelier d’Albrecht Dürer, cela pour l’une des raisons suivantes :
- D’autres artistes travaillant dans le même atelier portaient eux aussi le prénom Hans, de sorte qu’il était nécessaire de les distinguer.
- Baldung aurait affectionné de s’habiller en vert les jours de fête.
- Le surnom viendrait du fait que Baldung, à l’instar d’autres artistes allemands de la Renaissance, coloriait le papier sur lequel il dessinait, comme en témoigne son Autoportrait de jeunesse, colorié en vert.
- L’explication selon laquelle le surnom viendrait de l’expression Grün hinter den Ohren signifiant « jeune et inexpérimenté » est peu crédible car Baldung n’était pas forcément le plus jeune des apprentis de Dürer.
- Baldung signant de nombreuses œuvres avec ses initiales et une feuille de vigne, verte au printemps, il se pourrait qu’il eût choisi lui-même ce surnom. Toujours est-il que sur de nombreuses œuvres, il a complété son monogramme en y ajoutant le G de grien, passant ainsi de « HB » à « HBG ».
50 nuances de vert
Le Livre d’esquisses de Karlsruhe rassemble une centaine de dessins de Hans Baldung Grien. Parmi ceux-ci, certains portent des indications de couleur, notamment différentes nuances de vert :
- grien / grün (vert)
- gel-grien / gelbgrün (jaune verdâtre)
- schögrie / schöngrün (beau vert)
- grogrie / graugrün (gris verdâtre)
- gelgrie / gelbgrün (jaune verdâtre)
- schwitzergrie / Schweizergrün (vert suisse)
- jegergrie / Jägergrün (vert chasseur)
- dunkel grien / dunkelgrün (vert foncé)
Sur le dessin présenté ci-dessous, par exemple, la tête de l’oiseau exotique aurait dû être verte puisque Baldung y a indiqué la mention « grien ».
Le vert à travers les âges
Le vert est de nos jours associé à l’écologie et à la nature, tout en symbolisant l’espoir et le bonheur. Mais il est aussi présent dans des expressions telles qu’« être vert de colère », « vert d’envie » ou « vert de rage ». On voit donc que, sémantiquement, cette couleur peut prendre une connotation aussi bien positive que négative. Et puisque le vert est instable chimiquement et peut changer de teinte, c’est aussi la couleur associée à la métamorphose.
Le vert, jadis
Alors que les Égyptiens considéraient que le vert offrait une protection face aux esprits malins, les Romains l’associaient — ainsi que le bleu — aux Barbares car Celtes et Germains teignaient leurs habits en cette couleur. Le vert prit de nouveau une connotation positive au Moyen Âge classique, époque à laquelle il fut associé à l’esprit chevaleresque.
À la fin du Moyen Âge, c’était toujours la couleur de la joie et de la beauté mais, alors que le bleu accédait au statut de couleur noble et précieuse, le vert prit retrouva sa connotation négative en tant que couleur du démon, des sorcières et du poison.